Au petit matin d'une belle journée de l'été 2017, en remontant le vallon des Étançons encore dans l'ombre, contrastes et ambiance grandioses en faces Sud du Râteau et de la Meije. Sur son arête ensoleillée, à 3092m, un minuscule refuge perché scintille...
Au petit matin d'une belle journée de l'été 2017, en remontant le vallon des Étançons encore dans l'ombre, contrastes et ambiance grandioses en faces Sud du Râteau et de la Meije. Sur son arête ensoleillée, à 3092m, un minuscule refuge perché scintille...

2018 :

10ème saison là-haut !

Une belle et dernière année au Promontoire.


Depuis bientôt 10 ans notre vie se partage entre « le bas » (le petit hameau de Freydières à 1150m, en Belledonne, au-dessus de Grenoble) et tout là haut au refuge du Promontoire (5 mois par an perché à 3100m en face sud de la Meije) au cœur du Parc National des Écrins.

 

Une expérience de vie complètement hors du commun.

Une vie de contrastes fous...

Nous sommes là haut en continu, par grand beau temps calme, grosse tempête de vent ou orage impressionnant, avec de la neige tous les mois y compris en été, en présence de nombreuses cordées ou seuls au milieu d'un désert total pendant de longues journées... Nous vivons en permanence "immergés", de jour comme de nuit, au cœur des éléments d'une nature impressionnante et loin au-dessus des territoires aménagés par les hommes. Là haut nous avons toujours les yeux rivés 1000 mètres plus haut encore… pour observer ce qui s'annonce coté ciel ou pour scruter ces imposantes parois et suivre la progression de microscopiques petits points (humains ou beaucoup plus rarement animals). Puis nous redescendons le regard 1000 mètres plus bas vers le vallon des Étançons et le refuge du Châtelleret (à 2225m). Nos yeux remontent alors le sentier qui chemine sur la moraine pour anticiper des visites possibles, dans une, deux ou trois heures... Nous sommes en veille permanente, les sens visuels et auditifs toujours en éveils.

 

Si nous "habitons" très hauts, nous y sommes aussi minuscules,

comme perdus dans l'immensité. Sans doute comme la haute-mer, la haute-montagne rend humble, autonome et solidaire. Quoi qu'il se passe nous devons d'abord compter sur... nous, souvent seuls. Parfois aussi c’est un passager connu ou inconnu, un professionnel de la montagne ou a un amateur qui naturellement aide, renseigne, porte assistance. Par « chez nous », l’attention aux autres et la coopération sont aussi naturelles que de dire bonjour à tous.

Là haut, la montagne est trop belle pour que nous ayons envie de la "vaincre". Et même si nous avions eu cette folle prétention, la puissance des éléments nous aurait vite calmé. En montagne c’est plus souvent l'humilité qui domine et se conjugue avec simplicité, équilibre, engagement, harmonie... Si parfois nous nous sentons très très loin du bouillonnement consumériste et du stress de la vie urbaine des hommes nous sommes par contre très proches de ceux-ci, lorsque cinq heures durant, ils ont dépassé leurs appréhensions, surmonté les difficultés, parfois poussé avec une belle motivation leurs êtres, leur corps, pour réussir à arriver jusqu'ici nous rendre visite dans cet autre monde où le respect de la nature et des hommes redevient fondamental.

 

Cela pourrait paraître paradoxal mais c'est isolé tout là haut que nous avons le plus conscience d'être terriens.

La planète est là, impressionnante, magique, d'une beauté parfois presque irréelle. En haute montagne, beauté et fragilité paraissent intimement mêlées. Chaque été, nous sommes marqués, très marqués par les effets ultra-rapides et criants du réchauffement climatique. Nous sommes des sentinelles qui assistent à la multiplication des signes annonciateurs de vraies menaces pour notre humanité. Quand nous redescendons de notre vie intense et forte de là haut et que nous retrouvons la «civilisation » avec parfois ses débauches de futilités, notre motivation à agir est très forte pour modifier nos modes de vie et préserver la beauté de nos vies sur terre.

 

En 10 ans au Promontoire nous aurons accueilli avec un fort et sincère plaisir plus de 20 000 "passagers" le temps, d'une journée, d'une soirée, d'une nuit et pour beaucoup  la veille ou au retour d'une grande course d'alpinisme sur la Meije. Des moments rares et exceptionnels pour chacun, des moments riches de relations humaines "vraies", engagées et chaleureuses. Du bonheur fort pour eux, pour nous !

"scruter ces impressionnantes parois et suivre la progression de microscopique petits points (humains ou plus beaucoup plus rarement animals)"
"scruter ces impressionnantes parois et suivre la progression de microscopique petits points (humains ou plus beaucoup plus rarement animals)"
Là-haut,
je serai perché encore cette année,
avant de passer la main.

 

Quand nous avons été retenu par le CAF, il y a 10 ans pour devenir les nouveaux gardiens du Promontoire, nous avons eu du mal à y croire, c’était un rêve fou... !

 

La Meije est un sommet mythique, une montagne d'histoires...

et le refuge du Promontoire est un lieu chargé d'expériences de vies alpines extrêmement intenses. Pour les gardiens mais aussi et surtout pour tous ses passagers, alpinistes de toutes générations, randonneurs ou skieurs de rando. Nous souhaitons ardemment que ce rêve et ces moments de vie intenses puissent se poursuivre (avec nous en 2018) et avec d'autres collègues les années suivantes. Pour garder cette intensité intacte nous préférons nous arrêter tant que nous avons encore toute l'envie et l'énergie pour continuer...

 

Gardien en haute montagne c'est une aventure professionnelle extraordinaire, passionnante mais c'est aussi plus qu'une passion. C'est un métier que l'on exerce intensément parfois 24h/24, 7 jours sur 7 quasiment en continu pendant 5 mois, en cherchant à être toujours le plus disponible pour tous et pour chacun. Avec l'impératif de nourrir tout le monde le mieux possible, avec des équipements et des conditions peu imaginables vus d'en bas. Un métier dense, de veille permanente, de sommeil réduit et très fragmenté. Avec aussi, malheureusement, malgré cette vigilance de tous les instants, des accidents, rares, extrêmement douloureux.

Mais c'est un métier heureusement baigné d'innombrables moments partagés de vrai bonheur profond et de grands rêves réalisés, tout proches des étoiles. C'est un vrai engagement personnel difficile et c'est cela qui fait la force et l’intérêt extraordinaire du métier de gardien de refuge. Nous devons donc pouvoir tout donner, dans des conditions parfois rudes, du début de l'exercice de notre métier jusqu'au passage de relais à nos successeurs. Nous voulons ce passage d'un relais, dynamique, motivé et "en pleine forme".

 

Pour que les fortes aventures comme la Traversée de la Meije ou le grand alpinisme en faces Nord et Sud, ces projets rêvés et préparés parfois pendant de nombreuses années, puissent se dérouler dans les meilleures conditions possibles.

Ainsi j'ai demandé à la FFCAM de recruter avant cet été 2018 les futurs gardiens qui démarreront au Promontoire au printemps 2019, afin que nous puissions transmettre au mieux "les clés" du refuge et de la Meije.

 

Gardien du refuge du Promontoire sur la Meije,

c'était "un rêve fou", cela reste, et restera dans notre vie une expérience d'une beauté et d'une intensité folle, dans un environnement naturel et humain magnifique ! A jamais ancrée en nous, pour l'avenir...

 

 

Frédi et Nathalie Meignan

(et leurs enfants Leïla et Yoska)

gardiens du refuge du Promontoire depuis 10 ans,

(avec « juste un peu » d’émotion à l'idée d'avoir un jour prochain...

à redescendre pour de bon)

Pour 2018, Frédi sera là haut tout le printemps et l'été (jusqu'à mi-septembre)

 

Mardi 16 janvier 2018

Voir également l'article publié le 22 janvier

dans le Dauphiné Libéré.

"La Meije est un sommet mythique, une montagne d'histoires...  et le refuge du Promontoire est un lieu chargé d'expériences de vies alpines extrêmement intenses"
"La Meije est un sommet mythique, une montagne d'histoires... et le refuge du Promontoire est un lieu chargé d'expériences de vies alpines extrêmement intenses"

 "Les enfants de la Meije"

Un magnifique documentaire (26 ') réalisé et diffusé par France 3 en 2017.

Critique publiée dans "Terre Sauvage"

de janvier 2018 sous la plume de Catherine Perrin :

"Le film "Les Enfants de la Meije" a su capter la magie de ce repaire suspendu dans le vide. L'endroit est à couper le souffle, tant par la beauté inouïe du panorama que pour la prouesse technique : ce gîte en équilibre, minuscule proue d'un titanesque navire de roches grises,

tient de l'improbable. Dans ce reportage, on suit

le quotidien de Frédi et Nathalie qui vivent ici six mois par an..."